LA RENAULT 20 TS FACE A CES RIVALES

LA RENAULT 20 TS

L’action automobile de septembre 1977

La Renault 20 TS face à ses rivales (par A.Berthaut et J.P Malcher).

action-automobile-sept-77La disparition de la Frégate voici 17 ans avait laissé un vide que Renault vient seulement de combler avec la 20 TS. Ce vide ne concernait d’ailleurs pas seulement la gamme Renault ( encore que la Renault 16 se soit acquittée pendant longtemps et avec le bonheur de son rôle de voiture porte –drapeau avant l’apparition de la Renault 30 TS) mais aussi la classe des voitures françaises de 2 litres où l’on avait pris l’habitude de trouver aussi bien Citroën ( ID, DS, CX) que Peugeot (504) et Chrysler (2L).

L’apparition de la Renault 20 TS est donc un événement important. En raison, d’une part, du complément logique qu’elle constitue au sein de la gamme Renault où elle occupe la place qui lui était dévolue de longue date ( la Renault 20 L, TL et GTL n’étant que l’expression opportuniste d’une situation née de la crise). D’autre part, parce que la classe des berlines de 2 litres (actuellement 11 CV fiscaux) est particulièrement riche en Europe (Alfa Romeo, BMW, Chrysler-Simca, Fiat, Ford, Mercedes, Lancia, Opel, Peugeot, Triumph, Volvo) et que les hypothèses les plus sérieuses laissent entrevoir son développement dans les prochaines années. On s’attend en effet à voir glisser vers le haut l’intérêt de la clientèle jusqu’ici attirée par les berlines 1500/1800 cm3.

Parmi les nombreuses « grandes 2 litres » – on doit aussi compter avec les japonaises- il nous a fallu faire un choix. Ce choix s’appuie en premier lieu sur la vocation familiale des berlines ici présentées. Cela signifie que nous avons dû écarter les « pur-sang » qui répondent à d’autres critères. La Renault 20 TS se trouve donc confrontée ici avec la construction européenne produit de meilleur dans cette catégorie. Mais il ne faut pas omettre d’accorder toute son importance au prix. La cylindrée est sans doute un critère de sélection facile à comprendre mais le prix donne des bases de comparaison plus étendue car il ne peut être intéressant de comparer ce qui est offert sur le marché à un prix donné.

N.B : La notation est sur 10.

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Un équilibre rationnel

la Renault 30 TS est apparue sur le marché en février 1975, juste un an après le début de la crise de l’énergie. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner qu’avant même sa sortie les « commerçants » de la Régie aient cherché une position de repli et demandé aux techniciens une version économique de la 30 TS, mieux aux exigences du moment. Ce fut, en novembre 1975 (qu’il a fallu faire vite !), la Renault 20 L, TL et GTL, équipée du moteur de la vaillante Renault 16 qui venait de fêter ses 10 ans…

mais, en réalité, la Renault 20 était prévue, dès l’origine, pour être quelque chose de très différent d’un « Renault 30 sous-développée ». il s’agissait bel et bien d’une version de la Renault 30, mais propulsée par un moteur 2 litres entièrement nouveau, produit par la française de mécanique à Douvrin dans le Nord, et qui connut quelque retard dans sa mise au point, si bien qu’il fallut bien trouver une solution économique de remplacement.

Un moteur seulement

Voici le vraie Renault 20 – la 20 TS – dans sa version définitive, officielle pourrait-on dire. De quoi s’agit-il ? Simplement d’une Renault 30 dans laquelle on a remplacé le moteur V6 de 2664 cm3 par un 4cylindre en ligne de 2 litres à simple arbre à came en tête entraîné par courroie (une première chez Renault).

Nouveau moteur, très à l’aise sous le capot, en porte-à-faux devant l’essieu avant, légèrement incliné sur la gauche pour abaisser le carburateur double corps, avec l’admission et l’échappement de part et d’autre de la culasse, mais moteur volumineux (est-ce parce que qu’il est en alliage léger comme la culasse ?) si on le compare au 2 litres Fiat double arbre par exemple. Laissons à Luc Augier (voir « Le Mois d’Auto ») le soin de vous en dire plus sur ce moteur dont on attend diverses applications chez Citroën notamment, chez Peugeot aussi, et enfin Formule 3 où il entend concurrencer le monopole de Toyota.

Du point de vue technique, pratiquement tout est repris des deux modèles précédents – 30 TS ou 20 – avec, toutefois, quelques adaptations nécessaires. Ainsi, pour la transmission, la boîte de vitesse à 4 rapports est celle de la Renault 30 TS mais, étant qu le moteur est de 12 % moins puissant que le V6, il a fallu adopter un couple conique 5,7 % plus court qui, avec des pneus de 165 SR 14 (20 TS) au lieu de 175 HR 14 ( 30 TS), donne un facteur de performance 7,66 % plus « court » : 29,53 au lieu de 31,98 km/h à 1 000 tr/mn. Adaptation aussi en matière de suspension, (disques à l’AV seulement), de direction à crémaillère assistée), enfin d’aménagement intérieur.

Il faut savoir encore que la transmission automatique Renault à commande électronique est disponible en option, que les jantes sont étanches pour pouvoir recevoir des pneus sans chambre, que le réservoir contient 67 litres (plein difficile à faire à cause du diamètre ridicule de la goulotte) et que l’on peut demander l’air conditionné.

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Le bilan

EQUIPEMENT – FINITION : modèle intermédiaire entre la Renault 20 GTL et la Renault 30 TS, on pourrait penser que la Renault 20 TS se place à mi-chemin quant à sa présentation et ses équipements. Il n’en est rien car elle est beaucoup plus proche de la 30 que de la 20 GTL. Elle bénéficie en particulier d’une finition soignée, de sièges en tissus, d’un pare-brise feuilleté, du système de réglage à distance des phares en site, des glaces AV à commande électrique, du verrouillage magnétique des 4 portes, d’un plafonnier supplémentaire à droite qui fait office de lecteur de cartes. On déplore les essuie-glaces sans balayage intermittent et qui laissent un important angle mort à gauche, l’absence d’appuie-tête et d témoin de réserve d’essence. D’autre part, la tige de la jauge d’huile est trop courte et l’on peut facilement se brûler au collecteur d’échappement. Enfin, la roue de secours, logée sous la voiture à l’arrière, fera pester bien des conductrices et même des conducteurs !


  • CONFORT – BRUIT : confort général de bon niveau, en particulier grâce aux sièges et au niveau sonore en dessous de la moyenne des voitures concurrentes dans la zone des vitesses les plus courantes. On doit cependant regretter quelques trépidations des trains roulants, certains claquements d’amortisseurs sur mauvaises routes, l’efficacité moyenne des amortisseurs (en détente surtout) et la tendance assez prononcée au roulis en virage. 8/10
  • HABITABILITE : on sait que Renault a modifié l’aménagement du compartiment arrière lorsque fut étudiée la version « administration » de la Renault 30. On note un bénéfice en habitabilité aux places arrière, la distance entre le dossier des sièges AV et celui de la banquette arrière étant passée de 63 à 72 cm, et l’espace pour les jambes de 19 à 26 cm. D’autre part, pour ce qui est de la largeur aux coudes, la Renault 20 TS, avec 146,5 cm, qui se révèle presque aussi généreuse que l’Audi 100. 8/10
  • COFFRE : l’adoption de béquilles pneumatiques pour aider l’ouverture de hayon est la bienvenue. Grand coffre (400 dm3) garni d’un tapis de feutre, pourvu d’un éclairage, mais diminué du volume des passages de roues. Bonne accessibilité mais seuil de chargement très haut. Il faut aussi rappeler que la Renault 20 TS peut être aménagée de cinq façons différentes, la dernière dégageant complètement l’arrière comme dans un break, la tablette et la banquette AR complètes pouvant être déposées. On dispose alors d’un plan de charge de 207 cm de long (maxi) offrant un volume de 1,40 m3. Il s’agit d’une particularité propre à la Renault 20 TS par rapport à ses concurrentes. 9/10
  • MOTEUR : la nouveauté, au moins dans le comportement global, se situe au niveau du moteur. Disons-le tout net: il est paisible et les 110 ch sont mis à rude épreuve par le poids (1260 kg). Dans son utilisation courante, il a le mérite d’être docile, correctement souple, mais surtout silencieux. S’il monte dans la zone des 6000 tr/mn (limite autorisée), c’est sans beaucoup de bonne volonté. Son inertie est assez importante. Il fait bien ce qu’il faut et, pour le soulager quelque peu, on l’a gratifié de rapports de transmission relativement « court » si bien qu’à la vitesse avec la zone rouge. Reconnaissons-lui enfin une bonne sobriété en consommation. En somme, il est dommage que la gabarit de la voiture ne permette pas à ce nouveau groupe propulseur de se mettre mieux en évidence. 7/10

 

  • TRANSMISSION : la commande hydraulique donne beaucoup de douceur à l’embrayage qui n’est absolument pas fatigant en circulation urbaine, bien progressif et apte aux démarrages rapides (il est vrai qu’en ce cas le patinage des roues motrices confie aux pneus le rôle de l’embrayage !). Boîte de vitesses excellente, presque silencieuse. Mais la grille est très légèrement désaxée et la course du levier un peu trop longue. On aimerait d’autre part qu’il soit possible d’atteindre plus de 80 km/h en 2° et plus de 127 en 3°. 9/10

 

  • DIRECTION : c’est celle qui équipe la Renault 30 TS, l’assistance étant assurée hydrauliquement. Volant de 29 cm de diamètre que l’on a bien en mains (il est gainé) et démultiplication logique : 3,3 tours de butée à butée. Généralement agréable, elle devient pesante lorsque la voiture est en appui en virage et, dans ce cas, manque de rappel. Elle est fidèle mais son efficacité est handicapée par le guidage moyen du train avant du fait des pneus un peu juste en section. Le chuintement des valves est moins gênant que dans la 30 TS. Le principal reproche concerne les réactions dont le volant est le siège sur mauvaises routes. 6/10

 

  • TENUE DE ROUTE : si l’on compare la moyenne réalisée à Montlhéry en septembre 1973 avec une Renault 16 TX (93 ch et 5 vitesses) et celle de la Renault 20 (110 ch et 4 vitesses), on ne manque d’être étonné : 111,370 km/h avec la seconde, toutes deux ayant le même rapport/puissance (11,45 kg/ch). Voilà pour le rendement global.

Une analyse plus fine de la tenue de route révèle, pour la 20 TS, un comportement curieux ou, plutôt, plusieurs comportement. Cela tient à plusieurs choses: le choix des pressions des pneus (sous virage marqué avec les pressions d’origine), la qualité de la route (survirage brusque si la suspension AR se détend brusquement après une bosse en virage), le mode de conduite adopté (écrasement de la suspension sur la roue AV en appui avec tendance à l’accentuation du braquage).

Assez floue sur ses suspensions, la voiture n’a pas toujours une assiette bien stable. Ceci, bien entendu, à travers le prisme que constitue le redoutable circuit routier de Montlhéry. Heureusement, pour une conduite normale, telle ou telle caractéristique risque de n’apparaître qu’en cas de situation critique. On regrette alors simplement que le roulis ne soit pas mieux maîtrisé et que les pneus soient sous-dimensionnés. 6/10

  • FREINS : nous avons trouvé les freins agréables en conduite touristique familiale grâce à leur douceur, leur progressivité, la facilité du dosage, le servo remplissant bien son rôle. Mais les freins sont devenus moyens dés que les contraintes ont été plus dures: il a fallu augmenter la pression sur la pédale dont la course s’est allongée et les décélérations ont perdu de leur efficacité. Troisième stade : tout s’est considérablement détérioré en conduite sportive : impression de freiner « sur du bois », blocages parasites (les pneus compliquaient la situation), instabilité. Tout étant ensuite rapidement rentré dans l’ordre, on ne pouvait conclure qu’à une passagère perte d’efficacité à chaud. 6/10

 

  • CONSOMMATION : on remarque que, par rapport à la Renault 20 GTL, la 20 TS a une consommation très légèrement supérieure à 120 km/h sur autoroute (10,83 l/100 km contre 10,75) malgré la cylindré 21 % plus forte. En revanche, sur routes à 75 km/h de moyenne (parcours varié), le 2 litres plus généreux en reprises prend l’avantage sur le 1600 cm3, permettant d’obtenir en effet 8,81 l/100 avec la 20 TS contre 10,20 l/100 avec la 20 TS contre 10,20 l/100 avec la Renault 20 GTL. Ces résultats sont à rapprocher de ceux mesurés avec la Renault 30 TS : 11,61 l à 120 km/h et 10,93 l à 75 de moyenne. La comparaison avec les autres berlines de 2 litres place la Renault 20 TS en 2° position juste derrière la Fiat 132 aidée, il est vrai, par sa boîte 5 vitesses.

Il faut aussi remarquer que la 20 TS, comme la CX et la 504 d’ailleurs, est relativement lourde. Son poids (1260 kg) dépasse en effet de 120 kg celui de la Fiat. 8/10

  • CONCLUSION : peut être, avec ce modèle, Renault dispose enfin de la voiture moyenne supérieure qui lui manquait depuis la disparition de la Frégate. La présentation, l’équipement, la recherche du silence, les concessions faites au confort en optant pour une suspension faiblement amortie sont autant de témoignages des choix qui ont été faits et qui tendent à placer cette berline compacte et maniable parmi les familiales utilitaires de bon standing. Nous ne pensons pas qu’il faille regretter qu’elle tourne résolument le dos au « brio sportif ».

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CES RIVALES:

– LA CITROEN CX 2000 SUPER (Mollesse oblige)

 

 

 

 

 


– L’AUDI 100 2000 GLS (Un moteur et de la place)

 

 

 

 

 

 


– LA FIAT 132 2000 (Politique de la raison)

 

 

 

 

 

 


– LA FORD TAUNUS 2000 GHIA (Toute la séduction)

 

 

 

 

 

 


– L’OPEL REKORD 2000 E BERLINA (Résolument sérieuse)

 

 

 

 

 


– LA PEUGEOT 504 TI (Une valeur sûre)

 

 

 

 

 


– CARACTÉRISTIQUES TECHNIQUES

Retromania le must francais

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LES RENAULT 20 ET 30 :

RENAULT REVIENT AU HAUT DE GAMME.  (article parue dans un magazine sous forme de journal en février 2003)

Ce prototype de la grande Renault a été surpris en janvier 1975 par l'Action Automobile... et l'avait été bien plus tôt par d'autres magazines. A trois mois du lancement, la mécanique continue de subir des tests avec cette carrosserie qui n'a pas été retenue, en dépit (ou à cause) de ses lignes innovantes: hayon type Renault 15/17, boucliers, poignées façon Renault 5, pli de tôle en partie basse. ainsi gréé, le modèle aurait peut-être marqué davantage son époque.

La Vel Satis succède à la Safrane laquelle remplaçait il y a dix ans la R25. Auparavant, il y eut la … R16…certes, mais ce n’est pas tout et il semblerait que la mémoire collective ait sauté une marche, celle des R20 et 30 : il existe de bonnes et braves berlines, confortables, solides et sûres qui après avoir rendu de grands services durant de longues années, même longtemps recherchées sur le marché de l’occasion pour leur fiabilité sombrent dans l’oubli, voire l’indifférence.  Assurément, les Renault 20 et 30 font partie de ces oubliées : elles ont pratiquement déserté nos routes et les parcs de voitures d’occasion puisque les exemplaires les plus jeunes ont presque vingt ans. Et pourtant, elles méritent un sort meilleur, car d’un point de vue historique, elles marquent un retour réussi de la marque de Billancourt dans le haut de gamme, retour qui aura permis à trois autres générations de haut de gamme de voir le jour et de rencontrer un certain  succès.

Une tradition retrouvée.

Durant la période de l’entre-deux guerres, le constructeur d’automobiles en France derrière Citroën offre la particularité de proposer une gamme de voiture de tourisme étonnement large allant de la petite 6cv à la gigantesque 40cv; les années trente perpétueront cette tradition en voyant naître des Reinastella, Vivastella et autres Suprastella toutes somptueuses et puissantes. Durant les années de vaches maigres de l’après guerre, la Régie Renault tâche de conserver tant bien que mal s clientèle traditionnelle avec les  Frégates et Prairie, puis en diffusant quelques unités de la Rambler américaine. A cette époque, aucune  voiture française de haut de gamme ne résiste à l’incomparable et néanmoins excellente DS19 de chez Citroën, c’est pourquoi, la Régie concentre ses forces sur la voiture populaire avant de revenir sur le segment de la voiture moyenne avec cette fois une carte jouant l’originalité, la R16.

La couleur de lancement de la Renault 30 est un or métallisé qui ne durera qu'une saison.Cette R16 aux débuts modestes allait connaître une grande carrière commerciale, ses versions TS et TX allant jusqu’à chatouiller, à l’instar de la 504 Peugeot une DS régnera pratiquement sans partage entre 1958 et 1974. En parallèle avec l’essor de la R 16, la Régie signe des accords de coopération avec l’un de ses concurrents, Peugeot dans le domaine de la mécanique : ainsi naît en 1966 la Société Française de Mécanique destinée à partager les investissements encourus dans les frais d’études et de mise au point de nouveaux moteurs et de boites de vitesses partagés ensuite par de futurs modèles des deux firmes.

La période prospère de la fin des années soixante et les premières années de la décennie suivante allaient naturellement orienter le choix vers un moteur de cylindrée importante sous la forme d’un V6. Il manque aux deux constructeurs une grosse voiture de taille à concurrencer directement cette insolente DS 21 mais aussi les références étrangères de chez Mercedes, BMW, Alfa-Roméo, Volvo, déjà spécialiste du haut de gamme.

Ainsi, les grandes sœurs des R16, 504 et autres Volvo 164 prennent  forme en extrapolant leur conception sur chacun des modèles dePar rapport à la 604 présentée au même moment, l'atout de la Renault 30 est son hayon arrière, qui en fait néanmoins une voiture moins >. référence afin de satisfaire les clientèles respectives de chacun des constructeurs :

Carrosserie à deux volumes avec hayon arrière et traction-avant chez Renault, propulsion et style classique à trois volumes « maison » pour Peugeot et Volvo. Au cours de la prospère année 1973, des croquis d’une futur « R23 » sont publiés dans la presse spécialisée présentant la voiture avec un avant incliné à la fois aérodynamique et agressif tandis que Citroën « monte » une fois de plus en gamme avec la DS 23, nec plus ultra de la gamme D.

Et puis survint la guerre du Kippour et ses douloureuses conséquences dont l’effondrement du marché de l’automobile, et plus spécialement celui du haut de gamme. Chez nos trois constructeurs, le lancement rapproche et les outillages sont commandés : il est impossible à ce stade de revenir en arrière puisqu’il serait encore plus désastreux de renoncer au lancement des nouveaux modèles alors que la quasi-totalité des importants investissements a eu lieu.

Un coffre, sept positions : ce n'est pas la kama-soutra mais, tout comme au temps de la Renault 16, le compartiment arrière offre de multiples possibilités.

Mars 1975 : lancement de la R30 TS au salon de Genève.

Lorsque la nouvelle Renault 30 est dévoilée au public, elle trouve une concurrente toute jeune et déjà bien installée sur le marché, la CX de chez Citroën, modèle successeur de la fameuse DS. D’autre part, le « torchon brûle » entre les deux constructeurs français associés, car il était convenu entre eux que la Régie ait la primeur à Genève, alors que la Peugeot ne devrait être révélée qu’au Salon de Paris suivant. Changement brutale de stratégie peut-être stimulé par un marché en récession qu’il faut s’efforcer de réveiller en révélant des nouveautés ? C’est la plus plausible des réponses.

L'intérieur cossu d'un des premiers modèles. On ne peut pas s'empêcher de trouver un peu sommaire le dessin de la planche de bord.En tous les cas, la 30TS fait sensation et est censée récupérer rapidement un certain nombre de propriétaires de R 16 TS ou TX. Proposée au prix de 37.000 francs, c’est une berline relativement imposante pour l’époque puisqu’elle mesure 4,52 mètres de long et 1,73 mètres de large, pour un poids de 1320 kilos. La ligne est agréable et passe-partout puisqu’elle n’affiche pas un caractère aussi fort que celle de la R 16 dix ans plus tôt : en effet, les berlines à deux volumes dotées d’un hayon se sont banalisées en Europe au cours des années soixante-dix, et les silhouettes des Simca 1307/1308, des Volkswagen Passat, ou autres Lancia Bêta présentent de troublantes ressemblances.

Animée par le fameux PRV de 2664 cm3 qui développe 131 chevaux, elle atteint les 185 km/h ; ce PRV est un moteur de six cylindres en V ouvert à 90° en alliage léger coulé sous pression, équipé d’un arbre à cames entraîné par chaîne. Ce moteur de 16 cv fiscaux qui fit couler beaucoup d’encre qui fit couler beaucoup d’encre pour son manque d’équilibre et sa voracité en carburant équipé depuis la fin 1974 les coupé et cabriolet 504 Peugeot et le Volvo 264.

 Néanmoins, la presse comme les premiers clients apprécient le confort, la tenue de route, la puissance du freinage, le silence et l’habitabilité. Il manque peut-être tout juste quelques précieux centimètres pour les jambes des passagers arrières. Proposée principalement dans des tons métallisés, la R 30 TS est surtout livrée en gris clair, anthracite, or, marron, bleu clair ou vert clair. Les teintes opaques sont plus rare et comptent le blanc, le noir, le bleu marine et un rouge très vif.

Dans un contexte économique difficile, le démarrage commercial de la R 30 TS est modeste comparé aux scores des autres modèles de la marque : 17.474 exemplaires auront été construits, dont 8.092 unités livrées en France.

1976 : déjà la R 20 : l’espace en plus.

En fait, la R 30 des débuts allait ouvrir l’éventail d’un véritable gamme : à la Noël 1975, de grands placards publicitaires allaient envahir le pays dévoilant la nouvelle R 20 : « l’espace en plus » est le slogan choisi pour cette nouvelle 9cv reprenant la mécanique de la R 16 TX toujours proposée en parallèle. Justement la R 20 L est proposée au même prix que la R 16 TX, soit 32.600 francs : sa finition légère et son hayon couleur caisse intégralement la rendent peu attrayante, encourageant la clientèle à opter pour la TL proposée au prix de 33.700 francs en boîte manuelle, et 36.700 francs avec la boîte automatique.

la Renault 20 est lancée à la fin de l'année 1975. le salon en question est celui de Bruxelles, en janvier 1976.Enfin, la GTL propose en série la direction assistée, les lève-vitres électrique des portières … autant d’équipement juste là réservés à la 30 TS. Suivant la boîte de vitesses, la GTL est proposée à un tarif se rapprochant de celui de la 30 : 36.900 et 39.90 francs alors que la 30 TS est proposée respectivement à 41.200 et 45.300 francs.

les Renault 20 sont plutôt bien accueillis par la presse et la clientèle : les qualités routières, le confort, la qualité des sièges « pétales » qui maintiennent bien, la consommation raisonnable, l’habitabilité et la capacité du coffre accessible par un hayon, la boite de vitesse sont autant d’atouts seulement tempérés par quelques défauts:  les performances sont un peu juste puisque le 1647 cm3 de la 16 TX développant 90 chevaux peine un peu ; on enregistre des résonances à 120 km/heure, des réactions désagréables dans le volant et un éclairage avant presque insuffisant.

Dans ce contexte plus souriant d’un relatif retour à la prospérité, les 20 et 30 effectuent une percée intéressante sur le marché français : 36.000 R 20 sont écoulées et pas moins de 16.260 R 30 en cette année 1976.

1977 : Le succès s’affirme dans un contexte économique meilleur.

Le millésime 1977 n’innove pas beaucoup, et les grosses Renault trouvent leur place sur le marché sans faire d’ombre aux R 16 qui continuent une carrière prospère en parallèle. Les démocratiques R 20 sont proposées dans des tons plus voyants, communs avec le reste de la gamme, y compris la populaire 4L : du vert jardin, du jaune vif, du bleu roi ou du beige daim outre le rouge constituent la palette de teintes opaques complétée par quelques tons métallisés proposés en commun avec la R 30 : vert, gris, anthracite, or, marron, bleu.

La production stagne à moyenne altitude : 106.000 unités en 1976, 112.000 en 1977, ce qui est moins bien que la Citroën CX produite à 130.000 unités ou les concurrentes étrangères deux fois plus produites que les Renault : 266.000 Opel Rekord, 235.000 Ford Granada, 200.000 Volvo 244/264…Il est temps de faire évoluer la gamme et surtout de combler le « trou » existant entre la 9cv R 20 et la 15cv R 30.

1978 : La R 20 TS, ou quand la R 20 trouve son équilibre.

Pour le millésime 1978, la clientèle obtient le modèle réclamé par le réseau : une 11cv capable de lutter à armes égales avec la concurrence : c’est la R 20 TS. Cette nouvelle deux litres est équipée d’une mécanique moderne étudiée en commun avec le groupe PSA : le bloc en alliage léger à arbre à cames en tête de 1995 cm3 développe 110 chevaux et permet à la voiture d’atteindre les 170 km/heure. La presse spécialisée souligne les qualités de ce moteur qui équipe trois concurrentes françaises, à savoir la Citroën CX Athéna, la Peugeot 505 et R 20 TS : cette mécanique souple et équilibré gagne la confiance du gros bataillon de la clientèle, les R 20 normales paraissant en conséquence encore plus sous-motorisées. En revanche, quelques fausses notes subsistent comme l’absence d’appuie-tête, les résonnances du moteur à vitesse élevée, ou le freinage manquant quelque peu de résistance.

Forte de cette gamme couvrant les puissances fiscales de 9, 11, et 15cv, les R 20 et 30 enregistrent de beaux succès commerciaux en France comme dans le reste de l’Europe : 121.500 unités sont produites en 1978, ce qui constituera le record absolu.

1979 : La R30 TX coiffe la gamme.

La régie met l’accent sur l’équipement en dotant sa gamme de ceintures de sécurité aux places arrière, de feux arrière anti-brouillard, et d’essuie-glaces à deux vitesses pour les R 20.

La nouvelle R 30 TX coiffe l’ensemble de la gamme, ( à boîte mécanique ou automatique) ; elle est reconnaissable à ses jantes originales à croisillons se voit dotée du moteur PRV à injection développant 142 chevaux capable d’entraîner l’auto à 186 km/heure. Proposée à 81.000 francs, elle concurrence les CX 2400 GTI et autres 604 TI V6.

1980 : Les R 20 et R 30 à l’apogée de leur succès commercial en France: les R 20 Diesel entrent en scène.

Alors que la Régie Renault écoule tout juste 104.00 unités de son haut de gamme en Europe, elle vend 64.500 R 20 en France en 1980 contre 54.300 en 1979 alors que la diffusion de la R 30 fléchit de 11.500 unités à 7.300 : le second choc pétrolier est passé par là et Renault innove pour le millésime 80 en proposant le diesel sur la R 20: les nouvelles R 20 TD et GTD qui se distingue par des détails d’équipements sont équipées d’un moteur de 2064 cm3 développant 64 chevaux autorisant la  » modeste » vitesse de pointe de 146 km/heure.

« elle raccourcit les distances » tel le slogan de lancement… et le succès est au rendez-vous en cette nouvelle période de vaches maigres.

Revenons sur les teintes de carrosserie qui évoluent avec les modes : les teintes opaques criardes sont passées de mode depuis le millésime 1979, date à laquelle apparaissent un beige clair, un bleu marine, un vert assez foncé tandis que les teintes métalliques enrichissent leur palette d’un super vert algues (clair), d’un  vert sombre, du jaune tilleul outre les classiques gris, anthracite, or, marron, bleu moyen et foncé.

1981 : De nouvelles déclinaisons pour la R 20 : LS et TX.
Pas de répit pour le haut de gamme de chez Renault qui entre dans sa sixième année de vie active : les R 16 sont parties à la retraite, et la R 18 a conquis une place commerciale de premier plan.

Les R 20 et 30 ne sont pas en reste puisque deux nouvelle versions voient le jour pour le millésime 81 : Une R 20 LS, moins performante que la TS qui continue d’être le best-seller de la gamme : cette version est équipée d’une mécanique dégonflée de la TS qui continue d’être le best-seller de la gamme : cette version est équipée d’une mécanique dégonflée de la TS avec le 1995 cm3 dont la puissance est ramenée à 104 chevaux au lieu de 110 : le vitesse de pointe  est de 170 km/heure et la voiture proposée au prix de 54.800 francs semble être une affaire même si sa boîte de vitesses n’en compte que quatre contre cinq pour la TS. Cette version LS sonne le glas des versions originelles équipées du 1647 cm3 dont seule le version GTL subsiste.

Parallèlement, une 20 TX, plus intéressante coiffe la famille des R 20 en proposant des performances appréciables autorisées par le montage d’un nouveau 2,2 litres de 2165 cm3 développant 115 chevaux et propulsant la voiture çà 178 km/heure. Cette nouvelle 12cv reconnaissable aux roues qui équipaient les premières R 30 est proposée au prix de 65.700 francs ; elle trouve sur sa route les CX et 505 dotées de la même mécanique. Des 20 et des 30, il y en a désormais pour tous les goûts et toutes les bourses : des8, 9, 11, 12 et 15cv ! La puissance s’échelonne de 64 à 142 chevaux passant par 90, 104, 110, 115, et 131 chevaux. La palette de teintes de carrosseries s’enrichit d’un  bordeaux foncé très apprécié sur toute la gamme Renault de l’époque, d’un vieil or métallisé, d’un bleu profond appelé bleu abysse métallisé et d’un marron métallisé très sombre.

1982 : Le Diesel Turbo vient au secours de la R 30.

En 1982, le succès de nos grosses cylindrées commence à se tarir puisque 70.000 exemplaires seulement seront construits contre 79.000 en 1981, et cette érosion se retrouve en France, principal pays de diffusion de ces modèles (85% de la production y est désormais écoulée) : le second choc pétrolier touche de plein fouet les ventes de grosses cylindrées qui résistent vaille que vaille : 44.800 R 20 neuves sont vendues en France et 15.500 R 30 : ce rebond s’explique par la nouvelle version Diesel Turbo apparue à l’automne 81 s’avère infiniment plus performant et agréable que la R 20 Diesel puisque sa mécanique de 2068 cm3 développe 85 chevaux, et atteint 160 km/heure. Reconnaissable facilement à ses roues de style, elle est proposée au prix de 81.000 francs. La presse est favorable à cette nouvelle version dont le surcroît de puissance, la faible consommation, la bonne direction ( assistée), la tenue de route, le silence et le confort constituent les principales qualités aloes que la voiture qui commence à accuser le poids des ans continue de plonger au freinage, est lourde, chère et ne propose pas de volant réglable.

1983 : Chant du cygne pour la gamme avec la R 20 Turbo Diesel.

La recette de la 30 TD semble faire recette et la Régie l’applique sans complexe à une R 20 qui s’essouffle sérieusement : ainsi naît pour le millésime 83 la 20 TD équipée de la même mécanique que la 30 du même nom. Incontestablement, les versions Diesel Turbo représenteront le gros des ventes des deux derniers millésimes et raviront les gros rouleurs, comme les chauffeurs de taxis. Accomplissant d’impressionnants kilométrages de l’ordre de 300.000 kilomètres, elles seront longtemps recherchées sur le marché de l’occasion.

Les ventes ne s’écroulent pas complètement à la veille de leur remplacement puisque pas moins de 37.000 R 20 et 9.000 R 30 seront écoulées durant l’année calendaire 1983.

Les voitures de ce millésime seront reconnaissables au discret volet aérodynamique placé sur le hayon arrière, en outre, la 20 LS est enfin équipée d’une boîte de cinq vitesses.

Les teintes proposées sont le plus souvent sombres : noir, anthracite, brun, vert ou bleu tandis qu’un élégant gris-bleu métallisé relativement clair plait aussi.

1984 : En guise d’épilogue.
La carrière des R 20 et R 30 est interrompue au printemps 1984, date d’apparition d’une nouvelle espèce automobile, la R 25 : ce demi-millésime se déroule en roue libre jusqu’à épuisement des stocks : seulement 2.390 R 20 et 148 R 30 seront écoulées en 1984 en France.

Au total, 396.000 R 20 et 101.000 R 30 soit près d’un demi-million de voitures auront été vendues dans l’hexagone ce qui représente un score fort honnête pour une gamme rencontrant sur sa route deux dépressions économiques nées des chocs pétroliers successifs.

Globalement, près des deux-tiers des R 20 et R 30 auront été immatriculées sur le sol français ; la suprématie et la stabilité du succès de la R 20 TS se retrouve, les R 30 à essence ne représentant qu’une vente sur sept.

Les versions Diesel, et de milieu de gamme auront su prêter main forte pour maintenir la flamme du succès tandis que les concurrentes françaises auront connu des carrières tout à fait comparables:

La CX se sera vendue à 550.000 exemplaires mais sur une durée deux fois plus longue, tandis que les 505 et 604 réunies avec 450.000 unités auront fait juste un peu moins bien ; au palmarès des ventes, le tandem R 20/30 aura figuré le plus souvent devant leurs rivales en tous cas entre 1979 et 1983, tandis que la CX, très appréciée au Danemark, aux Pays -Bas, en Belgique ou en Suisse se sera mieux exportée.

Au total, 782.668 exemplaires auront été construits en l’espace de neuf ans, dont à peine 20% de R30.

Le modèle le plus produit est le meilleur de toute la gamme, la 20 TS dont 312096 unités auront été produites (40% de la production), suivie par les R 20 de base produites à raison de 184014 unités (23.5% de la production totale) et des R 20 Diesel produites en 91675 exemplaires.

Les excellentes 20 et 30 Diesel Turbo, produites sur la fin de carrière du modèle auront servi de banc d’essai pour la R 25.

Il est aujourd’hui temps de réhabiliter les R20 et R 30 et de sauver les derniers exemplaires avant qu’ils ne disparaissent à leur tour, ce qui pourrait arriver d’ici deux ou trois ans si personne ne s’en occupe ; ce sont de bonnes routières confortables, bien équipées surtout comme les 30TD ou TX, ou encore les 20TX.

En fait, il ne manque qu’un peu de flamme ou d’inspiration à ces valeureux modèles pour qu’ils suscitent l’engouement en collection : leur image quelque peu banalisée, dépassionnée très en phase avec les « seventies » les dessert alors qu’elles sont robustes, correctement construites : excellentes tractrices de caravanes, on les imagine souvent surchargées plongeant de l’arrière, ce qui correspond plus à une image de besogneuse que de sportive.

Les CX ou 604 sont entrées dans le monde de la collection depuis plusieurs années, elles ne demandent qu’a être rejointes par leurs rivales de Billancourt !

RETROMANIA – N° 101 – FEVRIER 2003